Je ne pensais pas revenir tout de suite sur les représentations des bibliothécaires dans l’imaginaire collectif, mais, hasard de l’actualité, voici que la rentrée littéraire nous gratifie d’Un nouveau roman-cliché sur les bibliothécaires : La Cote 400 de Sophie Divry aux éditions Les Allusifs.
Voici un extrait de la chronique qui lui est consacrée sur le blog de la librairie Mollat, intitulée « Dewey mon amour » :
« Peut-être avez-vous le souvenir, ancien, de ces bibliothécaires aux petits relents de poussière qu’on pouvait croiser dans les couloirs de leur antre et auxquelles on n’osait pas même un salut (les bordelais pourraient citer un nom, inoubliable mais, bon, nous passerons pudiquement dessus), ces êtres dévoués à une cause qu’on n’imaginait pas encore perdue, ces gardiennes d’un temple que le moindre bruit souillait?
[…]
L’héroïne de La cote 400 a tendance à ressasser un brin et le témoin muet de son monologue qu’elle a trouvé dormant dans ses étagères va payer cher son incartade car notre névrosée de première le mitraille de ses rafales de phrases percutées et les sujets ne manquent pas à cette dame sans public : la Dewey bien sûr, les lecteurs (quelle horreur !), la politique municipale, les atroces collègues, les bonnes cotes (et les mauvaises). Vous ne lui échapperez pas.
[…]
Son petit roman aura en tout cas une sacrée cote chez nous, c’est déjà ça… »
A cette occasion, l’enssib propose la lecture d’un extrait de colloque, une intervention consacrée à ce thème : Images et portraits de bibliothécaires, littérature, cinéma par Marianne PERNOO (2003). Je vous en conseille la lecture, il y a des portraits savoureux… mais pas très flatteurs :
« Il est étonnant de voir à quel point le personnage du bibliothécaire est à la fois abondamment traité dans la littérature et au cinéma et globalement méconnu dans sa représentation. Il y a là un paradoxe : l’écrivain est passionné par le commerce des livres et beaucoup d’écrivains se sont frottés aux métiers du livre : imprimeur-libraire, journaliste (Gautier), fondeur de caractères (Balzac) et même bibliothécaire. Et cependant le métier de bibliothécaire semble toujours décrit de l’extérieur et fait l’objet d’une méconnaissance qui peut aller jusqu’à la caricature. »
[…]
« Voici le portrait peu flatteur du bibliothécaire tel qu’il apparaît à travers ces textes : défavorisé physiquement et socialement, en retrait devant la vraie vie, ennemi du lecteur qu’il a le devoir de servir, amoureux de références plutôt que de livres, refusant jusqu’à la folie de partager le savoir qu’il a en dépôt, au mieux transparent et falot, au pire inquiétant voire dangereux, « au demeurant le meilleur fils du monde » !
[…]
« Avec l’irruption du numérique, qui a fait voler les vieilles fiches cartonnées sous son vent révolutionnaire, nous attendons impatiemment une nouvelle représentation romanesque du bibliothécaire, médiateur du savoir, sauveur de la mémoire, thérapeute de l’information, Sherlock Holmes de la recherche documentaire et mettant tous ses talents au service du lecteur. N’est-ce pas à nous d’écrire et de construire le personnage, ou (si nos fonctions quotidiennes nous absorbent trop – comme c’est personnellement et collectivement le cas) d’en donner par la qualité de notre service une image claire et cohérente aux écrivains et cinéastes qui hantent encore nos bibliothèques et leurs réseaux?
Nos métiers sont en effet en pleine évolution. Depuis des années, nous mettons en œuvre des compétences sans cesse nouvelles. Cependant, l’image qui nous colle à la peau tarde à évoluer. Cela viendra-t-il un jour? Ce n’est pas sûr car les images d’Épinal ont la vie dure, comme l’illustre ce que nous avons tous entendu un jour ou l’autre : Ah, bon? « il faut une formation pour ranger des livres ?«
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