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Burkini, l’être et le néant (1)

J’ai mainte fois dénoncé dans ces colonnes les rumeurs et autres fausses informations qui pullulent, tant en numérique que sur le papier. Cela fait maintenant près d’un mois que les médias et les politiques glosent sur… du rien, du vide, du néant : le burkini où il n’est pas.

Un maillot de bains burkini dans un centre commercial de Kuala Lumpur MOHD RASFAN / AFP

Tout a commencé à Marseille (Pennes-Mirabeau en fait), avec un projet d’une journée détente dans un centre aquatique privatisé pour l’occasion, pour le 10 septembre prochain, par l’association Smile13 (Facebook fermé, site web à l’abandon) :

J’invite les sœurs qui participeront à avoir un bon comportement ; cad avoir une tenue adéquate (pas de maillot 2 pièce les parties du haut du buste au genoux doivent être cachés), même si nous sommes qu’entre filles nous allons pas aller à un défilé de mode lol

Blogueurs et politiques y sont allés de leur couplet, pour, contre, indifférent. Pour ma part, il s’agissait de la troisième option : privatiser une salle des fête, un musée, une boite de nuit… ou un centre aquatique pour y faire des choses qui ne concernent que les seuls participants, cela m’indifférait au plus haut point. Même pas de quoi partager un lien dans Facebook. La journée a finalement été annulée. Beaucoup de battage pour rien et résultat :

Pas de burkini.

Les débats ont ensuite rebondi avec une rixe en Corse (à Sisco), ayant abouti à un arrêté municipal interdisant le burkini. Le lendemain, on apprenait, oh surprise, qu’aucun membre de la famille musulmane concernée n’arborait de burkini. Les femmes se baignaient tout habillées avec leurs vêtements occidentaux, seule l’une d’elle portait un foulard en plus. Donc encore une fois :

Pas de burkini.

Le maire du Touquet, trouvant sans doute qu’on ne parlait pas assez de sa ville, a donc décidé de publier à son tour un arrêté d’interdiction du burkini. Pourtant, les habitués du coin, interviewés par les chaînes d’information continue le certifient : ils n’ont jamais vu le moindre burkini au Touquet. Le maire a d’ailleurs avoué qu’il n’en avait jamais vu non plus. Donc au Touquet non plus,

Pas de burkini.

On apprenait ensuite que les maires de Cannes (28 juillet) et Villeneuve Loubet (5 août), trouvant sans doute qu’on parlait trop du Touquet et pas assez de leur ville, avaient pris des arrêtés similaires. Mais les raisons invoquées sont plutôt sidérantes, jugez plutôt :

Thierry Migoule, directeur général des services de la ville de Cannes avait justifié la décision avec une bel aplomb confus : « Il ne s’agit pas d’interdire le port de signes religieux à la plage, mais les tenues ostentatoires qui font référence à une allégeance à des mouvements terroristes qui nous font la guerre ». Lionnel Luca, maire Les Républicains (droite) de Villeneuve-Loubet s’est justifié au nom de l’hygiène dans un premier temps : « On m’a signalé sur l’une de nos plages un couple dont l’épouse se baignait habillée, explique Lionnel Luca, et j’ai considéré que cela n’avait pas lieu d’être pour des raisons d’hygiène et que cela était malvenu compte tenu du contexte général. » Puis il a affirmé vouloir « ‘éviter tout trouble à l’ordre public dans une région marquée par les attentats ».

Les attentats, évidemment. On ne les avait pas vus venir! Le tribunal administratif n’y a rien vu à redire. Rappelons au maire de Villeneuve-Loubet que « burkini » ne désigne pas le fait de se baigner tout habillé. Par conséquent à Villeneuve-Loubet :

Pas de burkini.

On a appris, depuis, que trois femmes ont du s’acquitter de l’amende de 38€ à Cannes, le week-end du 15 août.

3 Burkinis!

Un battage plus important que celui provoqué par Pokémon Go pour trois malheureux burkinis! On croit rêver! Cela ne veut pas dire qu’il n’y en a pas ailleurs, dont personne ne parle, mais les médias et politiques n’ont essentiellement relayé que des endroits où il n’y en avait PAS!

A quand les arrêtés interdisant le bleu de travail sur le sable (sans doute aussi rares que les burkinis), le bikini en centre ville (bien plus fréquent) ou les déguisements de Pikachu? Ah, non, Pikachu, c’est déjà fait à Bressoles 😛

Plus que quelques jours pour aller visiter l’exposition des 70 ans du bikini! (cliquez sur l’image pour en savoir plus)

« Assurons-nous bien du fait, avant que de nous inquiéter de la cause. Il est vrai que cette méthode est bien lente pour la plupart des gens, qui courent naturellement à la cause, et passent par-dessus la vérité du fait, mais enfin nous éviterons le ridicule d’avoir trouvé la cause de ce qui n’est point. »
Histoire des oracles, Fontenelle – 1687

La loterie de l’indécence : c’est toujours la tenue des femmes qui est critiquée. Un homme, même en bermuda à fleurs, chemise ouverte et gourmette dorée, ne sera jamais indécent.

Lisez aussi :

Aller plus loin :

J’ai introduit deux plaisanteries dans les liens. Les avez-vous trouvées? Il s’agit de deux articles de El Manchar, une sorte de Gorafi algérien :

El Manchar est un site d’informations fausses et complètement saugrenues. Il a été créé dans le seul but d’explorer le champ de l’absurde. La devise d’El Manchar est « avec des scies, on refait le monde »

<Mise à jour du 26 août 2016 : Burkini cops>

La police du burkini française, digne de la police des mœurs iranienne!

Quel merveilleux cadeau fait à la propagande djihadiste! Les policiers, qui ne savent pas différencier un burkini et quelqu’un de tout simplement habillé, et même pas dans l’eau, se mettent à verbaliser tout et n’importe quoi au nom des arrêtés anti-burkini… Mais jamais les gens en polaire qui se baladent sur la plage le soir venu.
Une fois encore, la une des infos se fait sur des endroits où il n’y a PAS DE BURKINI.

Un bon résumé, par le dessinateur soudanais Khalid Albaih

</maj>

<MAJ du 25 juin 2018 : Drame sur la plage, France, 1974>

Drame sur la plage 1974

</maj>

2 commentaires sur “Burkini, l’être et le néant (1)”

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